Les récentes sorties du M23 et de « Senegaal bu nu beug » sur la proposition de loi portant réforme du Règlement intérieur de l’assemblée nationale, et l’ «externalisation » du PDUC, laissent, une nouvelle fois, apparaître dans les rangs de la société civile, les symptômes de la contamination du virus de la « politique politicienne ».
En effet, ce virus a été décelé pour la première fois au sein de Benno Siggil Senegaal, (BSS) dans la perspective des Présidentielles de 2012. L’on se souvient, qu’une partie de la société civile et d’autres partis politiques membres de BSS, s’étaient coalisés pour former « Benno Alternative 2012 », pour porter les «Conclusions des Assises nationales », au prétexte qu’il leur était inacceptable de s’allier avec le PS et l’AFP, à cet effet. Cette ambition de ces cercles de la société civile de « faire la « politique sans les partis politiques », qui auraient fait leur temps, n’avait pas fait long feu. Cependant, elle ne s’était pas contentée de fragiliser BSS en y provoquant une première division qui a balisé le terrain à une seconde division de cette coalition, qui a fini par la discréditer aux yeux de l’opinion. Mais « Benno alternative 2012 » s’était aussi disloquée pour un problème de leadership dans le choix de son candidat aux Présidentielles de 2012. Après cette déconvenue, ces mêmes milieux de la Société civile se sont encore investis pour se présenter en « Alternative » aux partis politiques, lors des élections locales de 2014, pour assister, impuissants, à leur plébiscite par les citoyens.
Les revoilà qui pointent encore le nez en s’organisant autour de « Senegaal bu nu beug », avec les mêmes prétentions d’ « Alternance citoyenne », les mêmes ambitions de mise en œuvre des « Conclusions des Assises nationales », que celles portées par « Benno Alternative 2012 ».
Leur recherche obstinée de porter le discrédit sur les Partis politiques, les a amené à les accuser d’avoir « trahi » le peuple des Assises du fait de leur incapacité de les faire appliquer par le régime de BBY.
Ainsi, à côté de la Confédération pour la Démocratie et le Socialisme (CDS), créée par les forces de Gauche, et du Parti « Taxaw Tem » qui ont comme programme les « Conclusions des Assises nationales » et la mise en œuvre de « l’Avant projet de Réforme » proposé par la Commission nationale de Réforme des Institutions, (CNRI), cette frange de la Société civile se positionne comme une « Alternative » pour incarner le « peuple des Assises nationales ».
Ce faisant, ils cherchent à masquer, par leur création de « Benno Alternative 2012 », leur responsabilité morale et politique, pleine et entière, dans l’incapacité du « peuple des Assises nationales » de se donner « un candidat et une équipe » de consensus, pour porter, en 2012, ses projets de réforme.
De même, ils occultent aujourd’hui, leur responsabilité dans l’incapacité du « peuple des Assises » à se mobiliser, pour imposer ses réformes, quand ils avaient conclu que les composantes politiques avaient failli !
Pourtant, les recommandations portées dans les « Conclusions des Assises nationales » disposaient clairement, que leur mise en œuvre incombait à toutes les parties prenantes à ces « Conclusions ».
Ainsi, si les « composantes politiques » ont failli, pourquoi ne pas reconnaître aussi que la « composante société civile », a été aussi défaillante ?
La culture « anti parti politique » de ces milieux de la Société civile que la tenue des « Assises nationales » avait fait penser qu’elle était révolue à jamais, refaisait toujours surface, dès que se dessinent des perspectives électorales.
C’est cela qui a fait de cette composante des forces vives de la nation, l’un des obstacles majeurs à leur rassemblement le large possible, pour créer des rapports de force en mesure de faire appliquer les réformes retenues de façon consensuelle lors des « Assises nationales », et des travaux de la « Commission nationale de Réforme des Institutions » (CNRI). D’ailleurs, les critiques récentes que cette composante de la Société civile a portées sur la proposition de loi de «Réforme du Règlement Intérieur de l’Assemblée nationale » font penser que la mise en œuvre de ces réformes est le cadet de leur souci.
En effet, les dispositions de cette proposition de Loi qui interdisent au démissionnaire d’un groupe parlementaire de rejoindre ou de créer un autre groupe, sont bien celles de l’article 82 de « l’Avant Projet de Réforme » proposé par la CNRI.
C’est cette même contradiction que l’on peut relever au niveau du M23, qui a fait la même critique, malgré le fait qu’il avait reconnu cette disposition dans « l’Avant Projet de Réforme » de la CNRI, dans un texte officiel qu’il venait de produire et de soumettre à ses membres.
Ce qui est encore plus grave pour le M23, c’est le fait que cette proposition de loi ne soit pas votée « article par article », mais sous forme de « paquet », alors qu’exactement, c’est sous forme de « paquet » que le M23 et autres membres des « Assises nationale » exigent que le Président Macky Sall, fasse adopter « l’Avant Projet de Réforme » proposé par la CNRI !
Toutes ces manifestations montrent, si besoin en était, la prégnance du virus de la « politique politicienne » dans ce milieu de la société civile.
Ils ont été tellement contaminés par ce virus, qu’ils en ont perdu le sens du discernement quand ils s’expriment sur l’ « externalisation » du PDUC au profit du PNUD.
En effet, comme le dit l’adage Wolof, ils ont entendu « crac », ils en déduisent que « l’os s’est fracturé !».
En fait, de quoi s’agit il ? Le Président Macky Sall a dit, d’une façon claire et nette , qu’il s’agit d’un « Programme d’urgence » qui vient « en complément » aux projets de même nature, qui sont entrain d’être exécutés par les Administrations concernées. Il ne s’agit donc pas d’ôter du « travail » aux Administrations, mais de ne pas les « surcharger », compte tenu des programmes qu’ils sont en train de mettre en œuvre !
Et il a dit clairement aux Administrations, que si le PNUD fait mieux que vous en termes de délai et de qualité, je vous dessaisirai à son profit !
Comment, après ces propos, ces milieux de la Société civile ont-ils pu être aussi sourds et /ou aveugles, au point de voir dans cette « externalisation », non pas un stimulant aux Administrations concernées à plus d’efficacité, mais une politique de leur « déresponsabilisation » ?
Fallait-il attendre que les Administrations concernées finissent d’abord à mettre en œuvre les programmes qui leur a été confiés, avant d’adopter un programme d’urgence supplémentaire pour ne pas être accusé de les « déresponsabiliser ? »
Du fait que ces ressources publiques ont pu être dégagées en dehors de celles déjà attribuées aux Administrations, ce serait irresponsable, et même coupable d’attendre, compte tenu des urgences qui assaillent les populations concernées.
Le véritable problème que « l’externalisation » au profit du PNUD soulève, c’est de savoir, s’il n’y a pas au Sénégal, d’autres organisations non gouvernementales pour faire ce travail et à quel prix?
C’est dans ce sens que la réaction du Congad m’a laissé sur ma faim. Cette ONG s’est juste contenté de récuser le PNUD sous prétexte que cela ne relève pas de sa mission, sans dire qui pourrait faire , à sa place, autant ou mieux et à quel prix ?
Si le Congad pouvait être une alternative, rien ne devrait s’opposer à ce qu’il mette en avant son expérience en la matière, et les coûts de ses prestations dans l’exécution de projets similaires s’il en a eu.
Mais, contrairement au Congad, le Forum Civil n’a pas nié les compétences du PNUD en la matière. Il s’est inscrit dans le même sens de ceux qui parlent de la « marginalisation » des Administrations, et des pertes d’opportunité de formation de ressources humaines de qualité que les frais payés au PNUD auraient pu donner au Pays.
Il est donc clair, que le PNUD ne se substitue pas aux Administrations, et il possède des compétences avérées et clairement rappelées par le Forum civil.
II ne reste donc que le coût de la prestation du PNUD à élucider.
Là où le gouvernement parle officiellement de 1 à 3%, c’est 3 à 7% qu’avance «Senegaal bu nu beug », en précisant que c’est cela le coût habituel des prestations du PNUD.
Dans cette affaire, « Senegaal bu nu beug » serait plus crédible s’il s’était basé sur la convention signée entre le gouvernement et le PNUD pour l’exécution de ces projets.
Mais, en évoquant les pratiques usuelles du PNUD, et non la Convention entre cette organisation et le Sénégal, l’on voit nettement les préoccupations de « politique politicienne » qui motivent un tel raccourci.
Il est donc temps pour que cette frange de la Société civile jette les masques.
Leur aveuglement pour le pouvoir fait d’eux, le véritable danger pour le Sénégal, autant pour leur rôle dans la division des forces vives de la Nation, que par le manque de contrôle citoyen de leurs activités et des programmes qu’ils mettent en œuvre, en se finançant sur une partie de l’Aide publique au Développement, et des apports des Fondations privées internationales.
Ils ne sont contrôlés ni par l’IGE, ni par la Cours des Comptes, et sont hors de portée de l’OFNAC tant qu’ils ne sont pas mêlés dans les programmes financés avec la contribution de l’Etat.
Ces hommes et femmes aux « mains propres », ne sont comptables que devant leurs bailleurs de fonds étrangers, mais veulent se présenter aux yeux des populations, comme les défenseurs de leurs droits, alors qu’ils ne sont que des bénéficiaires ingrats, des acquis des luttes menées des décennies durant, par les politiques au près des populations, pour plus de liberté, de démocratie et de justice sociale, au prix de lourds sacrifices de leurs carrières professionnelles, de leurs familles, et même de leur vie.
Le véritable danger pour le Sénégal, ce sont les prétentions de cette couche sociale de la Société civile.
Ibrahima SENE