Au cours de l’émission Club Diaspora du samedi 1er Décembre 2012 où j’étais l’invité du jour, Amath Diouf m’a interpellé sur le sujet des fonds politiques. Je me suis prononcé sur la question sans nuance avec l’argumentaire suivant.
Tout d’abord rappelons que dans son histoire l’emploi de fonds secrets se confond avec l’apparition de l’Etat entendu comme organisation d’un pouvoir politique. Peu importe la forme de cet Etat qu’il soit démocratique ou dictatorial. L’histoire est de toute façon emplie d’événements relatant l’utilisation discrète d’argent pour asseoir une politique, gagner une guerre ou obtenir des renseignements utiles à la sécurité d’un territoire. Dés lors je pense que, sur la nécessité de doter à nos autorités étatiques de fonds politiques, nous pourrons tous aisément y souscrire et l’accepter. Mais quand un ancien premier ministre se justifie d’en avoir usé et abusé pour les besoins du nécessiteux, de l’orphelin, des parents et du voyageur*. Je dis que ce type d’abus de confiance et de pouvoir mérite une condamnation pécuniaire sévère associé en plus d’une période d’inéligibilité pour faire réfléchir nos leaders politiques. La réglementation des fonds devient donc une urgence.
Ce sont ces dérives qui nous poussent à réclamer une réglementation de ces fonds. Parmi les mesures qui permettront de juger de la volonté politique affichée du nouveau régime à mettre en place la bonne gouvernance figurera en bonne place l’étude et la mise en place du mode opératoire d’utilisation des fonds politiques. Et avec souhait de voir se concrétiser l’appui et l’engagement ferme de sa majorité à légiférer sur le sujet. L’emploi de ces fonds sera donc dit démocratique et transparent si les sommes sont définies, attribuées et contrôlées par l’Assemblée Nationale disposant seule du pouvoir d’autoriser au gouvernement à utiliser les sommes issues de nos recettes dans le cadre d’un budget voté. Par contre, si l’opacité persiste malgré les déclarations de rupture il y aura de quoi se poser des questions et provoquer la suspicion à l’endroit de la volonté d’opérer ces ruptures si attendues. Il faudra donc que les sommes qui seront désormais mises à la disposition de toute administration ou institution fassent l’objet de contrôle extérieur à ces utilisateurs. Seul le fait du prince ou de ses affidés ne pourra justifier alors le recours aux fonds politiques pour entretenir une certaine clientèle politique.
A cet effet l’assemblée nationale qui se veut une assemblée de rupture devra plancher en premier lieu et au plus vite sur une loi déterminant les services ou directions éligibles aux crédits des fonds politiques. Je suggère que les services s’occupant d’enquêtes aux ministères des affaires étrangères vu le contexte sous régional appelé « cercle de feu » autour de notre pays en bénéficient amplement. D’autres services seraient aisément éligibles comme les services présidentiels, les renseignements généraux, certains services du ministère de l’intérieur, la Centif ou autres.
En deuxième lieu il faudra que l’Assemblée Nationale s’empresse de voter dans la même loi l’instauration d’une Commission de vérification des fonds politiques. Une commission qui pourra bénéficier d’une dotation budgétaire minimum et dont l’action sera inscrite dans le champ gouvernemental. Cette proposition s’inspire de la France qui a fait des avancées considérables sur la question depuis 2002, sous l’impulsion de Lionel Jospin. La dotation budgétaire à cette commission sera donc moindre du fait qu’elle ne consommer aucun ETP. Il lui sera donc permis de faire recours aux services de divers fonctionnaires mis à sa disposition. Les seules dépenses de fonctionnement que la commission financera sur la ligne budgétaire qui lui sera allouée ne concerneront alors que ses déplacements aux fins de contrôle sur pièces et sur place des crédits consommés.
L’assemblée Nationale pourra d‘ailleurs décider qu’au-delà du contrôle de la régularité et de la sincérité des comptes, la commission qui sera mise en place dans notre pays aura la mission d’évaluer la pertinence des dépenses. Ceci sera une innovation intéressante et un signal fort de bonne gouvernance, concept qui tient tant à cœur au Président de la République. J’invite d’ailleurs tous les citoyens d’encourager le Président et de le soutenir sur toute initiative allant dans le sens de l’instauration de la bonne gouvernance au cours de son quinquennat afin qu’on atteigne un stade de formalisation des règles de gestion et de contrôle satisfaisant.
Pour finir, juste à rappeler que le Sénégal est un pays qui est envié dans la sous région pour l’efficacité le professionnalisme et le sérieux de son état. La bonne gestion et une dotation sérieuse dans ses « fonds politiques ou spéciaux» ou « fonds secrets » tendra à redonner à cet Etat toute l’efficacité et la crédibilité que le régime de Abdoulaye Wade a fini par affaisser par son excès d’interventionnisme et sa tentative de monarchisation du pouvoir. Il faudra donc rendre à l’Etat toutes ses prérogatives et sa part de « secret » nécessaire pour renforer l’efficacité de son action. Il faudra alors trouver le dosage subtil entre « secret » et transparence, ce « secret » qui ne nuira pas à la démocratie. L’exercice est certes difficile mais réalisable.
Mohamed LY
2 commentaires
Thanks for the great article..
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